Résumé

Malgré une amélioration considérable de l’état de santé mondial depuis les années 1950, les inégalités d’accès aux soins ne se réduisent pas et touchent plus particulièrement les enfants et les femmes. L’objectif d’une couverture sanitaire universelle est loin d’être atteint et les dégradations environnementales viennent ajouter de nouvelles menaces sanitaires.

L’état de la santé dans le monde s’est considérablement amélioré depuis les années 1950. De 1990 à 2015, l’espérance de vie mondiale est passée de 64 à 71 ans et progresse en moyenne de 4 mois par an. Ces gains d’espérance de vie ont été d’autant plus forts que l’état des pays était catastrophique (de 49 à 58 ans en Afrique subsaharienne, de 58 à 68 ans en Asie centrale et du Sud, de 65 à 71 ans en Asie du Sud-Est, de 70 à 77 ans en Asie de l’Est et de 68 à 75 ans en Amérique latine).

Espérance de vie à la naissance, 1960-2015

Source : Banque mondiale, https://data.worldbank.org 

Commentaire : Pour les pays sélectionnés, le graphique permet de comparer la situation à la dernière date (2015), avec un écart de 33 ans entre l’espérance de vie la plus faible (entre 50 et 60 ans pour 8 pays africains) et la plus élevée (plus de 80 ans pour 17 pays d’Europe et d’Asie). Il montre aussi des trajectoires remarquables avec plus de 30 ans de gains d’espérance de vie pour 9 pays. Cependant, ces moyennes nationales gomment des écarts qui peuvent être importants à l’intérieur de chaque pays.

Vivre plus longtemps

Depuis le début des années 2000, la baisse de la mortalité infantile (-32 %), de la mortalité maternelle (-25 %) et de la mortalité due au sida (-50 %) et au paludisme (-49 %) sont le fruit des progrès en matière d’éducation, de réduction de la fécondité, de l’amélioration des conditions de vie et d’importants programmes d’ aide (vaccinations, antirétroviraux, moustiquaires imprégnées, eau potable, etc.) portés par la mobilisation de nombreux acteurs mondiaux (agences des Nations unies, ONG, fondations, fonds mondiaux, aides bilatérales et sociétés civiles).

Dans ce panorama général, de très fortes inégalités entre, et à l’intérieur, des sociétés persistent toutefois, voire s’aggravent. Cette question de l’équité en matière de santé est pourtant à l’ordre du jour des organisations internationales et des ONG depuis la fin des années 1970 (1978, Déclaration d’Alma-Ata ; 1994, Conférence internationale sur la population et le développement du Caire ; 2000, objectifs du Millénaire pour le développement 4, 5 et 6 ; 2015, objectifs de développement durable 3 et 6). Le maintien des disparités s’explique par les inégalités d’accès à une alimentation suffisante et équilibrée, à une hygiène correcte, à des soins réguliers ainsi que par les différences de niveau de scolarisation et de conditions de travail, de logement et de plus en plus d’ environnement. Les groupes les plus exposés aux problèmes de santé sont les pauvres des pays du Sud mais aussi ceux des sociétés du Nord qui ne peuvent se soigner correctement. En 2017, l’Assemblée mondiale de la santé a également mis en avant la question de la santé des réfugiés et déplacés (65,5 millions de personnes en 2016), exposés à toutes les violences et tous les risques sanitaires. risques sanitaires.

Mortalité infantile, 2016

Source : Banque mondiale, https://data.worldbank.org 

Commentaire : Si à l’échelle mondiale la mortalité des enfants de moins de 1 an connaît une diminution rapide, celle-ci est ralentie en Afrique et en Asie de l’Ouest où les taux restent très élevés, pouvant atteindre près de trois fois la moyenne mondiale. Ce marqueur de pauvreté et de déficience des services de santé publique est encore accentué dans les zones de conflits.

Alors que les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) visaient une réduction de 75 % de la mortalité maternelle entre 1990 et 2015, celle-ci n’a été que de 44 % (216 décès pour 100 000 naissances) et reste la première cause de mortalité féminine dans les pays du Sud, où elle touche surtout les populations pauvres, rurales et adolescentes. Elle s’explique par le recul du sida, les incitations à l’accouchement accompagné par un personnel spécialisé, un suivi des grossesses et de leurs suites et une meilleure information, autant d’éléments qui restent inaccessibles à de très nombreuses femmes. Le décès maternel sur la vie entière concerne en 2015 une femme sur 36 en Afrique subsaharienne contre une femme sur 4 900 dans les pays à revenu élevé, et dans plus de la moitié des cas ses causes sont évitables (hémorragie, infection et tension). 225 millions de femmes dans le monde ont un besoin non satisfait de planification familiale et on compte chaque année 89 millions de grossesses non planifiées, 48 millions d’avortements et 10 millions de fausses couches dans les pays en développement. Outre la déstructuration des cellules familiales, le décès des mères entraîne souvent la déscolarisation des enfants, et surtout des filles, qui doivent subvenir aux besoins domestiques. Pour rompre ce cycle, l’ ONU prône le développement d’une couverture de santé universelle, comprenant la santé sexuelle et reproductive avec pour cible prioritaire les femmes les plus pauvres et exclues de leur droit fondamental (reconnu par 179 États lors de la Conférence du Caire en 1994) à disposer des connaissances, de la capacité et des moyens d’avoir des enfants au moment et à la fréquence qu’elles souhaitent.

Accès à la santé, 2014

Source : Organisation mondiale de la santé (OMS), www.who.org 

Commentaire : L’écart spectaculaire entre les valeurs les plus faibles et les plus fortes des dépenses publiques et privées de santé par habitant dans les différents pays du monde (700 fois plus en Suisse qu’à Madagascar) témoigne des inégalités d’accès à la santé. Déficience des investissements publics et impossibilité pour les familles de financer le recours aux structures privées se cumulent pour la majorité des habitants de l’Afrique, de l’Asie de l’Ouest et du Sud-Est.

Menaces sur la santé publique mondiale

Outre des progrès insuffisants dans les domaines de l’eau (au moins 1,8 milliard de personnes consomment une eau de boisson contaminée par des matières fécales) et de l’assainissement (2,4 milliards n’ont pas accès à des toilettes ou des latrines), les risques sanitaires liés à l’environnement augmentent considérablement et sont aujourd’hui responsables de 12,6 millions de décès par an. Bassins fluviaux aux bilans hydriques déficitaires (plus de 40 % de la population mondiale ne dispose pas d’un approvisionnement en eau suffisant), pollution des eaux (80 % des eaux usées sont déversées dans les cours d’eau ou dans la mer sans traitement préalable), de l’air (92 % des habitants de la planète respirent de l’air contenant trop de particules fines, responsable de 7 millions de décès annuels) et des sols.

Enfin, la menace qui perdure malgré les progrès est celle de ne pouvoir se soigner correctement, bien que le droit à la sécurité sociale ait été reconnu comme un droit humain fondamental depuis 1948. En 2017, 400 millions de personnes n’ont pas accès aux services essentiels de santé, tandis que la généralisation de la couverture sanitaire universelle, mise sur l’agenda mondial depuis 2000, tarde à voir le jour dans nombre de pays.

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