Représenter l’espace mondial
Représentation du globe
Crédit : Anton Balazh / Shutterstock
Représentation du globe.
Construite à partir des images de la NASA cette carte de l’Asie pacifique illustre les mutations des représentations de l’espace mondial rendues possibles grâce d’une part aux images satellitaires (océans, côtes, relief, implantations urbaines) et d’autre part aux bases de données et systèmes d’information géographique qui permettent ici d’ajouter à l’image du satellite le réseau complexe des routes aériennes et de mettre en évidence la hiérarchie des connexions et l’importance des hub aéroportuaires (liste si place après votre relecture-complément).
Ni objectives ni exhaustives, les cartes ne sont qu’une interprétation du réel. Leur réalisation résulte d’une suite de choix, de lectures subjectives, d’une manière de voir, parfois de manipulation, souvent d’approximation. Ces images graphiques doivent permettre une perception instantanée et une mémorisation facile de l’information représentée ; leur efficacité s’appuie sur les règles de la sémiologie graphique. Des habitudes de représentation d’une géographie traditionnelle ne fonctionnent plus pour cartographier l’espace mondial, qu’il s’agisse de l’orientation au nord, du centrage sur l’Europe, de l’inexistence du Pacifique traditionnellement coupé en deux, ou des limites convenues.
Tout projet de carte pose la question de la disponibilité, de la qualité et la cohérence des sources et des données statistiques, celles-ci étant à l’image des acteurs qui les produisent. Cet ouvrage essaie, malgré les difficultés à réunir les données pertinentes sur certains sujets et les problèmes de représentation de la densité de réseaux d’échanges complexes, de trouver pour chacune des six grandes thématiques qu’il aborde un équilibre entre une vision d’ États juxtaposés et celle d’un monde de plus en plus transnational et global.
Identification des sources et collecte des données
La recherche, la collecte et le traitement des données ainsi que leur transcription graphique constituent les principales étapes du processus d’élaboration du document. Les décisions doivent être prises avec rigueur puisque l’interprétation des documents graphiques réalisés (cartes, graphiques, matrices, etc.) en dépend. Choisir un thème à cartographier, c’est aussi mettre en lumière un cas parmi d’autres. Le premier choix, le plus important, est de bien identifier le sujet à traiter graphiquement.
La révolution numérique a rendu les statistiques utiles aux sciences sociales plus accessibles, plus nombreuses et de meilleure qualité (malgré des carences dans certains domaines). La complexité des phénomènes abordés dans cet atlas nécessite de les réunir, les comparer et les articuler entre elles en gardant à l’esprit les statuts et les logiques de production de leurs auteurs. Il faut aussi accepter que les cartes et les graphiques ne montrent qu’un compromis, à un moment donné, entre un questionnement, des données plus ou moins vérifiables et des choix de représentation.
Les statistiques « officielles » (produites par les instituts nationaux de statistique, les ministères, les agences gouvernementales, etc.), issues des recensements nationaux, de la comptabilité nationale ou encore d’enquêtes, sont les plus abondantes. Leur qualité (exhaustivité, comparabilité, historicité, actualité, etc.) est conditionnée par les capacités administratives, techniques et conceptuelles que peuvent, et veulent, mettre en œuvre les États. Elles peuvent être amnésiques, indisponibles, voire falsifiées, notamment dans les États autoritaires ; indigentes et peu fiables dans les États les plus pauvres où même l’état civil fait parfois défaut. De plus, les fonctionnaires producteurs de données ne jouissent pas tous de la même garantie d’indépendance, ce qui influence la qualité des résultats (plus particulièrement en ce qui concerne les migrations, l’emploi, le chômage, les appartenances religieuses ou ethniques). Enfin, une partie des données découle du fonctionnement administratif des acteurs étatiques ; l’outil de gestion prime alors sur l’instrument de connaissance.
Les organisations internationales (OI) collectent, compilent, harmonisent et diffusent un grand nombre de données statistiques issues des États qui les composent. Elles mènent aussi leurs propres enquêtes, calculent des estimations et des projections et construisent des indicateurs composites. Ceux-ci font référence mais leur logique de production est fortement liée à leurs objectifs (classement, évaluation, etc.). Les OI réalisent également des rapports de synthèse sur différents thèmes, seules ou en coopération avec d’autres organismes interétatiques comme l’OCDE et les banques régionales de développement. Ce foisonnement ne règle pas le problème fondamental du cartographe : comment, avec des informations majoritairement étatiques, comprendre et rendre compte d’un monde de flux transnationaux et continus.
Les grandes ONG produisent régulièrement des données, des analyses et des rapports largement diffusés en ligne (Médecins sans frontières, Reporters sans frontières, Amnesty International, Greenpeace, Transparency International, etc.), base de leurs activités de plaidoyer. Transnationales par définition, elles sont moins contraintes, mais leur caractère militant est toujours à prendre en compte. Enfin, les données de certains centres de recherche font référence dans des champs d’études comme la pauvreté ou la conflictualité.
Pour des raisons de concurrence, les acteurs privés, surtout les entreprises, ne livrent pas facilement leurs données. Par exemple, les chiffres d’affaires des firmes globales sont collectés par des organismes privés, disponibles dans la presse spécialisée et en ligne mais difficiles à croiser avec d’autres sources. Pour le reste, il faut étudier leurs rapports d’activité annuels destinés aux actionnaires (publication obligatoire pour les sociétés cotées en bourse), intéressants par ce qu’ils révèlent de l’organisation et des logiques propres à la firme, mais où les données spatialisées sont souvent sommaires. L’opacité domine en ce qui concerne les flux financiers mondiaux, de surcroît extrêmement mobiles et en partie illicites. Enfin, de nombreuses statistiques pouvant servir de base à une activité lucrative sont payantes. Quant aux acteurs illégaux (migrations clandestines, paradis fiscaux, mafias, trafics, travail informel ou forcé, etc.), ils restent peu connus, même si les risques globaux que représentent ces pans invisibles de l’économie mondiale commencent à être étudiés de plus près par certaines agences de l’ONU telles que l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (UNODC) et l’Organisation internationale du travail (OIT).
Échelles de temps et d’espace
Le flux continu d’informations dans lequel les individus sont immergés laisse peu de place à la prise en compte de temporalités plus longues qui éclaireraient les événements. Utilisés comme illustrations de l’actualité, les chiffres mis en images sont trop souvent isolés de leur contexte, les sources généralement absentes ou incomplètes et pas forcément croisées. Dans le domaine économique notamment sont souvent mis en valeur des taux de variation d’une année sur l’autre, ce qui fait perdre en chemin les valeurs absolues et les principaux ordres de grandeur. Paradoxalement, l’information pléthorique est souvent amnésique et ne pas inscrire le présent dans des tendances n’aide pas à penser la complexité. Autant que dans l’ espace des sociétés, mieux vaut tenter d’être multiscalaire dans le temps.
Même dans le cas où des séries cohérentes dans le temps et pour tous les pays permettent les comparaisons de façon diachronique et synchronique, le résultat peut rester très insatisfaisant. En effet, les inégalités économiques, démographiques et sociales entre les régions au sein d’un même État, souvent très importantes, sont lissées par des valeurs moyennes nationales parfois trompeuses, particulièrement pour les très grands États. La diversité socio-spatiale, sa prise en compte dans le raisonnement et sa traduction cartographique ne peuvent être atteintes qu’en utilisant des données infranationales, souvent fragmentaires, mal raccordées et difficilement comparables d’État à État. Seule l’Union européenne possède, avec Eurostat, un appareil statistique fin et cohérent. Les grands États fédéraux fournissent des données sur les États fédérés mais les nomenclatures nationales ne se raccordent pas. Enfin, pour les grandes agglomérations urbaines mondiales, il n’existe qu’assez peu de données fiables et comparables. Au total, le décalage croissant entre abondance des données et complexité des processus en cours montre qu’approcher le monde mondialisé, global et local (glocal) transnational, aux acteurs multiples, avec des outils anciens ou partiels, est de plus en plus difficile. Les chercheurs, les cartographes, les enseignants, les experts, les journalistes, les étudiants et les lecteurs de cet ouvrage sont incités à beaucoup de vigilance et de distance critique.
Voir le monde : formes et points de vue
La projection cartographique permet la transcription d’une réalité sphérique (le globe terrestre) sur une représentation plane (la carte). Pour des raisons mathématiques, la projection ne peut respecter en même temps les distances, les angles et les superficies. Chaque projection déforme donc l’une ou l’autre de ces dimensions de manière sélective. De plus, le centrage choisi influence l’interprétation de la carte puisqu’il confère plus d’importance aux régions placées au milieu.
Ainsi, en associant projection et centrage, on obtient de forts écarts de « silhouette » du monde. Par exemple, la projection Mercator déforme les surfaces plus on se rapproche des pôles, exagérant l’importance des pays du Nord. Aussi cylindrique, la projection Plate carrée respecte davantage les surfaces. À l’inverse, certaines projections concentrent les discontinuités et les déformations dans les océans pour préserver la forme des continents. C’est le cas des projections Waterman et Fuller, dont l’éclatement des masses continentales facilite le tracé de flux, de la projection Goode, qui répartit les continents dans des lobes verticaux, et d’Atlantis, asymétrique autour de l’océan Atlantique. Enfin, les projections Bertin 1953, Natural Earth ou Mollweide proposent des compromis intéressants en cartographie dite thématique, alliant fidélité des surfaces et des formes continentales et compacité du dessin.
Le choix du centrage de la projection cartographique présente un éventail de possibilités quasi infini, certains paramétrages pouvant produire un monde difficile à reconnaître, conditionnés que nous sommes par notre vision d’une Europe au centre et du Nord en haut. La désaccoutumance n’est pas aisée. Selon les projections, le décentrement s’opère sur la longitude (coulissement Est-Ouest), la latitude (bascule Nord-Sud), la rotation ou les trois à la fois. L’outil de cartographie en ligne Khartis permet notamment de jouer facilement avec ces déformations et ces points de vue.
Voir le temps : le cas des graphiques
La visualisation des données sous forme de graphiques se révèle tout aussi efficace que les cartes. Ils fournissent des alternatives quand la spatialisation est lacunaire, inexistante voire impossible, ou bien lorsque que l’on souhaite simplifier l’information (en catégories). Les graphiques sont très adaptés pour montrer la dimension chronologique.
L’échelle verticale est à considérer attentivement. En plus de la valeur du « plancher » dont l’axe du zéro est parfois tronqué, il faut différencier la progression arithmétique de celle logarithmique. La première, la plus répandue, montre une succession de hauteurs alors que la seconde traduit l’évolution grâce à la pente de la courbe. Or l’échelle arithmétique renvoie souvent une impression d’évolution exponentielle, sans que l’on puisse voir les valeurs faibles ; l’échelle logarithmique transcrit l’évolution plus juste d’une date à l’autre et permet de comparer les tendances quelles que soient les valeurs (même les très faibles).
Les collections de courbes sont des graphiques adaptés pour comparer des profils chronologiques. Les courbes sont triées verticalement pour faire ressortir les similarités dans le temps (début, pics, bas et fin).
Types de données
Association de figurés, de symboles et de couleurs, les cartes et les diagrammes sont des images construites, donc en partie subjectives. Néanmoins, elles résultent d’une démarche scientifique qui s’appuie notamment sur la nature des données. On peut identifier deux familles principales de données selon les relations qu’entretiennent les valeurs.
Les quantités ou les effectifs (statiques ou dynamiques : population, flux de personnes, capitalisation boursière, PIB, etc.) sont triés selon un ordre croissant ou décroissant car liés par une relation de proportionnalité. Ces quantités peuvent être rapportées à une autre, on parle alors de quantités relatives (pourcentages, taux, densités, rendements, etc.), elles sont aussi ordonnées mais souvent rassemblées en classes qui entretiennent des rapports de hiérarchie. Cette partition – ou discrétisation – ne se fait pas au hasard, elle utilise des méthodes statistiques (s’appuyant sur la moyenne, l’écart-type, la médiane, etc.) ou manuelles (seuils observés). Ces méthodes sont variées et produisent des cartes différentes. Pour pouvoir comparer des cartes entre elles, il est impératif d’utiliser le même type de discrétisation.
Les données qualitatives peuvent être ordonnées (avec un ordre logique : dates, etc.), elles sont alors traitées de manière identique aux quantités relatives, ou non ordonnées (présence/absence d’une ONG dans un pays, appartenance à une organisation régionale, etc.), et entretiennent des relations de différence ou de ressemblance.
Transcriptions (carto)graphiques
Le renouvellement de la cartographie est issu des avancées de la sémiologie graphique qui, à partir des années 1950-1960, a été portée par les travaux de Jacques Bertin. En rupture nette avec la période précédente faite de cartes topographiques (dites d’état-major) et de croquis géographiques régionaux, Bertin synthétise un ensemble de règles permettant de traiter et de transcrire visuellement les informations. Son travail sur les variables visuelles combinées aux « primitives graphiques » (le point, la ligne et la zone) a révolutionné la cartographie pour enfin produire des cartes « à voir » (constituées de symboles et de couleurs) et non plus « à lire » (avec une forte présence de textes et des chiffres). Bien que la sémiologie graphique ait ensuite été adoptée, enrichie et parfois contestée par l’irruption successive d’outils et de pratiques nouvelles (système d’information géographique, infographie, cartographie dynamique, dataviz, etc.), elle demeure une grammaire visuelle robuste et incontournable.
Les choix graphiques doivent être pris en cohérence avec les données représentées. La proportionnalité, l’ordre ou la différence appellent des réponses graphiques différentes. Les confondre rend l’image au mieux peu lisible, au pire inexacte, voire manipulatrice.
Proportionnalité et ordre
La relation de proportionnalité entre les quantités absolues se traduit par la variation de taille des points, des traits ou des barres. Les quantités relatives déjà traitées en classes sont transcrites par des gammes de couleurs, ordonnées de la plus claire à la plus foncée (camaïeu). L’ordre visuel respecte l’ordre des données. Une rupture visuelle dans la gamme de couleurs ordonnées peut servir à mettre en évidence un phénomène particulier (par exemple, le passage d’une évolution positive à une évolution négative).
La comparaison de ces deux types de cartes enrichit considérablement la réflexion. On peut juxtaposer les deux images ou les superposer. Dans le cas d’une population, les effectifs totaux montrent plutôt le poids d’un pays par rapport à un autre, alors que les valeurs rapportées à 100 habitants transcrivent l’intensité du phénomène au sein de chaque pays (et permettent la comparaison entre pays de poids très différents).
Absence d’ordre, différence ou typologie
L’utilisation de tons de couleurs différents ne marque aucune hiérarchie, seule la différence ou la ressemblance sont exprimées. Pour que la superposition de données qualitatives ne nuise pas à la lisibilité, on combine souvent la taille, le dégradé, la couleur, la forme et l’orientation des figurés pour renforcer la séparation des différents éléments.
Ces quelques considérations méthodologiques sont loin d’être exhaustives ; nous invitons le lecteur à porter systématiquement un triple regard critique sur les cartes – leur message, leurs ficelles de construction et les données utilisées – afin de dépasser l’impression de reflet du réel qu’elles véhiculent de prime abord.
- sémiologie graphique > Sémiologie graphique
- Établie par Jacques Bertin à la fin des années 1960, elle s’appuie sur des moyens et des méthodes qui permettent de transcrire graphiquement des phénomènes. Elle implique l’organisation logique des données, la mise en évidence d’ensembles homogènes et la communication la plus efficace possible du résultat.
- géographie > Géographie
- Géographie : science sociale qui a pour objet la connaissance de la production et de l’organisation de l’espace. Cet espace sert à la reproduction sociale ; il est différencié et organisé. Géographie politique : étude de la dimension spatiale de l’organisation politique, généralement au sein des États. Géohistoire : étude géographique des processus historiques (diachronique).
- réseaux > Réseau
- La géographie classique a toujours survalorisé les surfaces, les territoires, les pays et les terroirs, mais l’analyse des réseaux est maintenant placée au cœur de sa démarche. Ils sont définis comme un espace où la distance est discontinue, et composés de nœuds reliés par des lignes. Ils sont soit matériels (réseaux de transport de personnes, de biens ou d’énergie, câbles informatiques et autoroutes de l’information), soit immatériels. Partiellement dématérialisés (internet par exemple), ils sont le fait aussi bien d’individus que d’organisations. Les philosophes (Gilles Deleuze et Félix Guattari), les sociologues (Manuel Castells), les politistes (James Rosenau) et les économistes utilisent ce concept pour analyser les logiques réticulaires de fonctionnement des individus.
- États > État
- L’État est un système politique centralisé (différent du système féodal), différencié (de la société civile, espace public/privé), institutionnalisé (dépersonnalisation de l’institution), territorialisé (un territoire dont les frontières marquent de manière absolue les limites de sa compétence), qui prétend à la souveraineté (détention du pouvoir ultime) et se doit d’assurer la sécurité de sa population. En droit international public, l’État se définit par une population qui vit sur un territoire borné par des frontières sous l’autorité d’un pouvoir politique (État national territorial).
- organisations internationales > Organisation internationale
- Selon Clive Archer, une OI est « une structure formelle, durable, établie par un accord entre ses membres (gouvernementaux et/ou non gouvernementaux), à partir de deux ou plusieurs États souverains, dans le but de poursuivre un intérêt commun aux membres ». Marie-Claude Smouts désigne trois traits distinctifs des OI : elles procèdent d’un « acte fondateur » (traité, charte, statut), s’inscrivent dans un cadre matériel (siège, financement, personnel), et constituent un « mécanisme de coordination ».
- flux > Flux
- L’augmentation des flux de biens matériels, immatériels, de capitaux et de personnes caractérise les processus de mondialisation en cours. Ces mobilités transfrontalières constituent un phénomène spatial dont les géographes et les cartographes, focalisés sur les territoires, ne se sont préoccupés qu’assez tardivement. Ces flux sont organisés en réseaux plus ou moins denses, non parce que les territoires et les lieux sont semblables et interchangeables mais parce qu’ils sont différents et interdépendants. Ils supposent des infrastructures (câbles sous-marins, oléoducs, gazoducs, routes terrestres, maritimes, fluviales, aériennes) et des activités logistiques (intermodalité des ports, aéroports de fret, entrepôts du e-commerce, hubs informationnels, etc.).
- ONG > Organisation non gouvernementale
- L’usage de cette expression s’est développé à la suite de son insertion dans l’article 71 de la Charte des Nations unies. Il n’existe pas de statut juridique international des ONG, si bien que ce sigle désigne des acteurs très différents selon les discours et les pratiques. Il s’agit généralement d’associations constituées de manière durable par des particuliers en vue de réaliser des objectifs non lucratifs, souvent liés à des valeurs et des convictions (idéologiques, humanistes, écologiques, religieuses, etc.) et non des intérêts. Actives tant à l’échelle locale que mondiale, sur des thèmes divers, les ONG se comptent aujourd’hui par dizaines de milliers, mais sont d’importances très inégales en termes de budget, de personnel et de développement.
- pauvreté > Pauvreté
- Désignant initialement le manque de ressources économiques, la notion de pauvreté s’est élargie, au cours des dernières décennies, afin d’inclure les différentes composantes du dénuement : conditions sanitaires déplorables, faible niveau d’éducation, inégalités sociales et de genre, violations des droits humains, atteintes à l’environnement, vulnérabilité accrue face aux catastrophes dites « naturelles ». L’indice de développement humain (IDH) élaboré par le Programme des Nations unies pour le développement au milieu des années 1990 (ainsi que sa variante genrée, l’indice sexospécifique de développement humain, ISDH) ou l’indice de pauvreté multidimensionnelle (IPM) conçu par des chercheurs de l’université d’Oxford en 2010 s’inspirent des travaux d’Amartya Sen sur les capacités (capabilities) en identifiant les privations dont sont victimes les pauvres en termes de santé, d’éducation et de niveau de vie.
- firmes globales > Firme multinationale
- Entreprise ayant réalisé des investissements directs à l’étranger (IDE) lui permettant de posséder des implantations qu’elle contrôle entièrement ou partiellement (des filiales). Les premières datent de la fin du xixe siècle ; elles se sont généralisées au début du xxie siècle. La majorité des IDE se font entre pays industrialisés. Plus que multinationales, ces entreprises sont transnationales et ont tendance, pour les plus importantes, à se transformer en entreprises-réseaux globales.
- migrations > Migrant
- Déplacement d’individus quittant durablement leur pays (émigration) pour se rendre dans un autre pays (immigration), de façon volontaire ou forcée (guerre, pauvreté, chômage, atteinte aux droits humains, conditions climatiques, etc.), et souvent en séjournant de façon plus ou moins temporaire dans différents pays dits de transit. Inhérents à l’histoire de l’humanité, les processus migratoires suscitent la mise en place de différents dispositifs de politiques publiques liés au contexte politique, économique et culturel ainsi qu’à la conception de la nationalité. Les États d’accueil s’efforcent d’organiser, parfois d’attirer (besoin de main-d’œuvre, exploitation de certains territoires, naturalisations, etc.), et plus souvent de restreindre l’immigration (contrôle aux frontières, quotas, titres de séjour, etc.). Les États de départ tentent, dans la plupart des cas, de maintenir des relations avec les nationaux et communautés diasporiques installées à l’étranger.
- mafias > Mafia
- Le terme désigne à l’origine des groupes criminels italiens et s’applique aujourd’hui de manière générique à tous les réseaux d’économie illégale fonctionnant sur la base du crime organisé (drogue, racket, prostitution, contrefaçon, etc.). Acteurs transnationaux les moins bien connus, ce sont des groupes très organisés, strictement hiérarchisés et en développement rapide dans les États incapables de les contrôler ou bien qui les tolèrent (Russie, Chine, Mexique, Colombie), où leur poids dans l’économie peut être considérable.
- risques > Risque
- Perception et prise en compte des dangers et menaces à l’égard des individus et de l’environnement. Apparue scientifiquement et politiquement à la fin du xixe siècle avec l’émergence d’un État-providence destiné à faire face aux nouveaux risques sociaux, la notion de risque s’est développée lors des dernières décennies avec la mondialisation des échanges et des innovations scientifiques et technologiques. Dans La Société du risque (1986), le sociologue allemand Ulrich Beck analyse le passage de sociétés « modernes » construites sur le dogme de la croissance économique et du progrès technique à des sociétés « postmodernes » centrées sur la production, la gestion et la régulation des risques. En témoigne l’essor du principe de précaution, destiné à anticiper les conséquences possibles ou probables d’une catastrophe dite naturelle ou industrielle, d’une épidémie ou d’une innovation technologique pour protéger les populations concernées.
- individus > Individu
- L’individu est un acteur social élémentaire dont la place va croissant dans les processus de mondialisation pour de multiples raisons, parmi lesquelles : la circulation accélérée des idées, des valeurs et des informations, la possibilité de construire des réseaux d’échange et de solidarité sans proximité physique, la création de réseaux d’experts internationaux, la lutte pour le respect des droits humains et les demandes de démocratie.
- espace > Espace
- Terme aux sens et usages multiples, catégorie bien moins abordée par les philosophes que celle du temps et qui a longtemps constitué une difficulté théorique (non consensuelle) pour les géographes dont ce devrait être l’objet central. Contrairement aux représentations courantes d’une étendue naturelle que rempliraient les sociétés, l’espace est un produit social sans cesse reconstruit par les interactions sociales. Il constitue l’une des dimensions de la vie sociale, à la fois matérielle et culturelle. Parler d’espace social n’augure pas de sa forme, territoriale, réticulaire, ou les deux à la fois.
- inégalités > Inégalité
- Répartition inégale des biens, matériels et/ou immatériels, considérés comme nécessaires ou désirables. Outre les inégalités de revenus (internes, internationales et mondiales), les inégalités, cumulatives, se mesurent également en matière d’accès aux services publics (accès à la santé, à l’éducation, à l’emploi, à un logement, à la justice, à une sécurité effective, etc.), à la propriété et plus largement aux ressources naturelles, ainsi qu’en matière d’expression politique ou de capacité de réaction face au risque écologique. Lorsque ces inégalités se fondent sur des critères prohibés par la loi, elles constituent des discriminations.
- fédéraux > Fédéralisme
- À l’échelle nationale, le fédéralisme est un mode de gouvernement accordant une forte autonomie aux communautés politiques fédérées en son sein. La répartition des compétences entre le niveau fédéral et le niveau fédéré de gouvernement, strictement définie dans les principes, reste souvent modulable dans la pratique (paradiplomatie des provinces québécoises, des Länder allemands, des cantons suisses ou des États du Brésil). À l’échelle internationale, le modèle fédéral est défendu au sein de l’Union européenne par les partisans d’une intégration politique plus forte et plus aboutie, par opposition aux défenseurs du modèle souverainiste, davantage intergouvernemental et interétatique.