Résumé

Malgré une baisse de la fécondité, la croissance de la population mondiale continue à un rythme soutenu, redessinant les équilibres démographiques anciens. Les régions qui connaissent aujourd’hui et connaîtront au cours des décennies futures les plus fortes dynamiques sont les plus pauvres, qui abritent les sociétés les plus fragiles et les plus exposées aux risques environnementaux, économiques, sociaux et sanitaires.

L’humanité comptait 500 millions d’individus au début du xvi e siècle, 1 milliard au début du xix e siècle, 1,5 au début du xx e siècle, 7,6 en 2017 et, selon la Révision 2017 des Perspectives sur la population mondiale des Nations unies, cette tendance à la hausse se poursuivra avec 8,6 milliards en 2030, 9,8 en 2050 et 11,2 en 2100.

Population des États et territoires, 2017

Source : Nations unies, division Population, WPP 2017, https://esa.un.org 

Commentaire : Cette carte montre la population totale des États en 2017. Seules la Chine et l’Inde dépassent le milliard d’habitants. Les autres pays les plus peuplés sont ensuite les États-Unis, l’Indonésie et le Brésil. Ces poids démographiques dépendent beaucoup de la taille des États et des densités de population. La plupart des poids lourds sont très vastes mais le Pakistan, le Bangladesh ou le Japon ne sont pas non plus des États-continents. Et les densités sont très inégales au sein de chaque pays, ce que la carte ne montre pas.

Combien d’humains ?

Les progrès des services d’état civil, les programmes d’aide à la réalisation et la synchronisation des recensements dans les pays du Sud, la mise en cohérence des informations au sein de bases de données révisées et des moyens de calcul toujours plus puissants permettent de disposer de projections démographiques relativement fiables pour les vingt à trente prochaines années. Au-delà, les débats sur l’universalité du modèle de la transition démographique, les incertitudes sur les effets conjugués du vieillissement, des épidémies, des conflits et des dégradations environnementales rendent les prévisions plus incertaines.

La croissance continue de la population mondiale est un défi qui ne pèse pas de la même façon sur les différentes sociétés du monde. Les combinaisons entre l’ excédent naturel et le solde migratoire sont multiples et évolutives et interagissent avec l’ensemble des facteurs sociaux et économiques. Depuis un demi-siècle, l’évolution démographique des grandes régions du monde, très contrastée, modifie durablement les équilibres mondiaux.

Évolution de la population, 1950-2050

Source : Nations unies, division Population, WPP 2017, https://esa.un.org 

Commentaire : Les deux graphiques montrent l’évolution de la population des continents entre 1950 et 2015, puis des projections jusqu’en 2050. Les courbes à gauche reflètent l’évolution : l’Afrique présente la croissance la plus forte, sur toute la période, et l’Europe la plus faible. Les histogrammes à droite indiquent la part des continents dans la population mondiale : les parts de l’Europe et de l’Amérique du Nord ne cessent de baisser, celle de l’Asie a connu son maximum et baisse dorénavant. Seule celle de l’Afrique augmente sur toute la période.

L’Afrique, l’Amérique latine (sauf l’Argentine et le Chili) et l’Asie (sauf la Chine) connaissent une croissance continue, alors que celle-ci est faible en Amérique du Nord, Europe et Australie ou ralentie en Chine et même en diminution en Russie et en Europe de l’Est.

Évolution de la population : Afrique, Chine et Inde, 1950-2050

Source : Nations unies, division Population, WPP 2017, https://esa.un.org 

Commentaire : Ces courbes comparent l’évolution de la population de l’Afrique, de la Chine et de l’Inde entre 1950 et 2050. Après 2015, ce sont des projections « moyennes » de l’ONU. L’échelle logarithmique montre l’évolution de la population par la pente des courbes. La croissance de la Chine ralentit dès 1990 (politique de l’enfant unique), puis de plus en plus jusqu’à diminuer vers 2030 ; la croissance de l’Inde reste soutenue plus longtemps et dépassera la Chine au cours des années 2020 ; enfin, l’Afrique montre une croissance encore plus forte et continue, ne fléchissant que légèrement après 2030.

La Chine, avec 1,4 milliard d’habitants soit 19 % de la population mondiale, et l’Inde, avec 1,3 milliard d’habitants soit 18 %, restent les deux pays les plus peuplés, mais vers 2024 la population de l’Inde devrait dépasser celle de la Chine dont la croissance est freinée par les conséquences de plus de trente années d’une politique de l’enfant unique et par le vieillissement de sa population.

Ce sont donc les populations les plus pauvres appartenant à des sociétés déjà en crise qui vont croître le plus vite, ce qui va aggraver la pauvreté et les défis du développement. Alors que la population de l’Europe dans son ensemble devrait diminuer d’ici à 2050 (de 742 à 716 millions), c’est en Afrique que la croissance sera la plus forte, avec un doublement de la population durant la même période (de 1 256 à 2 528 millions).

La croissance démographique et la question de sa soutenabilité ne peuvent donc être considérées indépendamment des conditions sociales, sociétales, économiques, politiques, civiles et environnementales.

Foyers de peuplement

Le découpage étatique est la base de la comptabilité des populations et permet les comparaisons mais il ne rend pas compte de la diversité des situations au sein des États, le peuplement de la planète étant souvent côtier et de plus en plus urbain. L’Asie (60 % de la population mondiale) se caractérise par une forte urbanisation et des densités rurales très élevées qui nourrissent un exode saisonnier ou permanent vers les villes, alimenté par l’écart croissant de richesse.

Densité de population, 2015

Source : European Commission, Joint Research Centre ( JRC) ; Columbia University, Center for International Earth Science Information Network - CIESIN (2015): GHS population grid, derived from GPW4 , multitemporal (1975, 1990, 2000, 2015).

Commentaire : Cette carte des densités de population dans le monde est construite à partir d’un carroyage dont le côté de chaque unité fait une vingtaine de kilomètres, contrairement aux représentations traditionnelles par État qui lissent les différences sur l’ensemble du territoire de chaque État. Cette carte montre avec précision la très inégale répartition spatiale de la population, allant d’immenses espaces vides à de grandes concentrations, généralement côtières, sauf dans la partie orientale de la Chine, en Europe et dans les vallées du Nil et du Gange.

L’Europe intensivement cultivée, anciennement urbanisée et industrialisée, s’organise autour d’un espace urbain quasi continu de production, d’échanges et de circulations – de Londres à l’Italie du Nord en passant par l’axe rhénan. Le peuplement des Amériques, surtout côtier, est plus dense au nord qu’au sud. Durant quatre siècles, la traite a transporté une main-d’œuvre servile d’Afrique vers le sud des États-Unis, les Caraïbes et le Brésil, puis, à la fin du xix e siècle et au début du xx e, l’arrivée massive de migrants européens a profondément transformé à son tour les territoires et les sociétés. La conquête de l’Ouest, en repoussant la frontière du peuplement, a dessiné les grands traits des densités actuelles des États-Unis. En Amérique du Sud, l’espace est moins profondément pénétré. Littoral au Brésil avec la présence de très grandes agglomérations, le peuplement n’est dense que dans l’axe du Rio de la Plata et, de façon moindre et discontinue, dans les Andes. En Afrique, le Maghreb, la vallée du Nil, la région des Grands Lacs et le golfe de Guinée forment des archipels de peuplement très denses, et le Nigeria est un poids lourd démographique (190 millions d’habitants en 2017).

Vides et fronts pionniers

Les espaces vides et supposés vierges ont été considérés, depuis le début du xx e siècle, comme des espaces de rééquilibrage démographique et, plus récemment, de conquête agroforestière et industrielle (Sibérie, déserts d’Asie centrale, Amazonie, forêt africaine, Indonésie) au prix de lourdes prédations environnementales, sociales et culturelles. Quant au Sahara, qu’une vision traditionnelle et déterministe considère comme vide et organisé en bandes Ouest-Est par la pluviométrie, il est en fait un espace de circulations Nord-Sud historiques de marchands, d’éleveurs nomades, de guerriers et de prêcheurs et aujourd’hui de groupes armés, de trafiquants d’hommes, d’armes et de drogue.

Contrastes et inégalitésDiversités religieusesMobilitésUrbanisation du monderetour en haut