Des organisations internationales plus vertes ?
Depuis deux décennies, l’ empreinte écologique des acteurs publics et des entreprises fait l’objet d’une attention croissante : les organisations internationales (OI) n’échappent pas à cette tendance. Le 5 juin 2007, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, appelait publiquement les organisations du système des Nations unies à devenir « vertes » – go green. La stratégie de neutralité climatique de l’ONU est acceptée en octobre 2007. À la suite de cette décision, est lancé le programme intitulé « ONU, du bleu au vert » – Greening the Blue – afin de remplir trois engagements : mesurer, réduire, compenser. Les chefs d’agence s’engagent à ajouter les données sur la gestion des déchets à partir de 2016, celles sur l’utilisation des ressources en eau potable dès 2018 et celles sur la formation du personnel en 2019. Bien que le processus ne soit pas prescriptif, depuis 2009, l’ONU présente un bilan annuel : 67 entités ont participé au calcul de leurs émissions carbone pour l’ édition 2017, et 56 ont fourni les données en matière de gestion des déchets.
Les études menées sur le verdissement d’OI telles que l’ OMC, la Banque mondiale et l’ ONUDI (Organisation des Nations unies pour le développement industriel) ont souvent montré des manœuvres avant tout symboliques – greenwashing. Pourtant, les dommages environnementaux causés par l’action des OI peuvent avoir des conséquences dramatiques. Par exemple, l’impact lié à la présence des camps de réfugiés supervisés par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés nuit à leur protection car il conduit (ou sert de justification pour) les gouvernements hôtes à refuser le droit d’asile. Le cas des opérations de maintien de la paix est aussi emblématique. Neuf mois après le séisme du 12 janvier 2010, la mauvaise gestion des eaux usées dans un campement des Casques bleus de la Mission des Nations unies pour la stabilisation d’Haïti a déclenché une épidémie de choléra qui a fait plus de 9 000 victimes et affecté près de 780 000 personnes. L’ONU a mis plus de cinq ans à reconnaître sa responsabilité.
Commentaire : Les missions de paix présentent une forte empreinte écologique : plus de la moitié des émissions de gaz à effet de serre de l’ONU (tout comme une production de déchets supérieure à la moyenne). Les autres programmes, même importants, émettent à hauteur de quelques pourcents chacun. Mais ramenées par personne, ces émissions varient du simple au triple (très élevées à la Banque mondiale ou l’AIEA). Ainsi estimées, le total de ces émissions onusiennes équivaudrait à celles du Laos ou de l’Islande.
- empreinte écologique > Empreinte écologique
- Pression qu’exercent les sociétés humaines sur les écosystèmes. Cet indicateur sert à mesurer l’impact des activités en évaluant la surface totale biologiquement productive nécessaire à chaque type de mode de vie pour produire les ressources consommées et absorber les déchets produits. Les valeurs (en hectares globaux par habitant) obtenues diffèrent largement selon les sociétés, plus ou moins prédatrices (entre 5 et 10 ha pour l’Amérique du Nord et quelques pays européens, à des chiffres inférieurs à 1 pour l’Inde, l’Indonésie et une partie de l’Afrique). Cette expression est aussi utilisée plus largement pour rendre compte des effets de l’action d’un individu ou d’une institution (firme privée, organisations internationales, projets spécifiques, etc.) en termes de dégradation environnementale.
- organisations internationales > Organisation internationale
- Selon Clive Archer, une OI est « une structure formelle, durable, établie par un accord entre ses membres (gouvernementaux et/ou non gouvernementaux), à partir de deux ou plusieurs États souverains, dans le but de poursuivre un intérêt commun aux membres ». Marie-Claude Smouts désigne trois traits distinctifs des OI : elles procèdent d’un « acte fondateur » (traité, charte, statut), s’inscrivent dans un cadre matériel (siège, financement, personnel), et constituent un « mécanisme de coordination ».
- greenwashing > Greenwashing
- Le greenwashing, aussi appelé vernis vert en français, rend compte d’une action destinée à tromper les consommateurs et consommatrices à l’égard des pratiques environnementales d’une entreprise ou des bénéfices environnementaux d’un produit ou service. Il peut s’appuyer sur un langage évasif, des images suggestives et/ou des allégations non pertinentes. Plus largement, il s’agit de détourner l’attention en mettant en avant des actions mineures en faveur de l’environnement, dissimulant des dégradations plus graves et les causes profondes de la dégradation environnementale.
- environnementaux > Environnement
- L’environnement est entendu largement comme la biosphère dans laquelle les espèces vivantes cohabitent, tandis que l’écologie étudie les rapports entre ces organismes et leur environnement. L’environnement comprend des milieux naturels très différents allant des forêts vierges laissées intactes aux milieux artificialisés exploités et aménagés par l’être humain. Dans une définition restrictive, on entend par questions environnementales les enjeux se rapportant aux ressources naturelles (gestion, exploitation et dégradation) et à la biodiversité biologique (faune et flore). En tant que problème public transversal, l’environnement concerne les enjeux d’organisation des sociétés (modèles de production, transports, infrastructures, etc.) et leurs effets sur la santé humaine et des écosystèmes.
- maintien de la paix > Maintien de la paix
- L’ONU définit le maintien de la paix comme « une technique conçue pour préserver la paix, aussi fragile soit-elle, une fois que les combats ont cessé et pour appuyer la mise en œuvre des accords facilités par ceux qui sont chargés du rétablissement de la paix » (Doctrine Capstone, 2008). Il se différencie du rétablissement de la paix qui concerne les conflits en cours, et de l’imposition de la paix qui comprend l’application de mesures coercitives dont l’usage de la force. La notion de consolidation de la paix renvoie à la fois au processus complexe de création des conditions d’une paix pérenne et aux mesures ciblées pour réduire le risque de reprise du conflit et jeter les bases d’un développement durable. Ces principes orientent, non sans susciter des critiques, la conduite des missions de paix.